SOUTENIR, PANDÉMIE OBLIGE.

Source: karisma.canalblog.com

Après plusieurs mois pandémiques, comment accompagner ? Comment être doula dans ce monde de fou ? Un point sur l’importance et quelques manières de continuer d’accompagner les familles en tant que doula.

État des lieux

Le monde entier est fragilisé, les doulas aussi. La planète entière est en manque de lien, de célébrations, les doulas aussi. Ce manque, ces situations que l’on vit dans nos pratiques peuvent créer beaucoup d’émotions diverses, selon notre expérience, nos valeurs, nos limites, nos besoins, et les raisons qui nous poussent à avoir tant envie de tenir cet espace d’accompagnement auprès des familles. Il faut dire que les limitations sont encore plus présentes qu’avant; impossibilité d’être physiquement présentes dans certaines maternités, augmentation de certaines interventions obstétricales difficilement recevables quant aux données probantes, fragilisation de la confiance des parents, remise en question de notre pertinence si le soutien physique est impossible, etc… non, ce n’est pas rose rose. Ces sentiments d’impuissance, de rejet, d’être soumises à des mesures qui n’ont pas toujours leur sens pour certain.e.s amènent plusieurs accompagnantes à … disons… être découragées. Frustrées. Tristes. Fatiguées. En colère.  

J’ai envie aujourd’hui, en me basant sur quelques infos dont on dispose, de crier un grand plaidoyer : CONTINUONS D’ACCOMPAGNER !! Peut-être pas comme avant, peut-être pas comme on le voudrait, mais continuons! C’est important. Parce que les parents sont fragilisés, car ils vivent un grand passage qui implique systématiquement des déséquilibres, une vulnérabilité universelle. Pendant une pandémie que l’on tente cahin-caha de maîtriser; les stresseurs augmentent. Leur transition, leur actualisation de leur nouvelle réalité s’en trouve compliquée; l’épuisement les guette, sourire en coin. Les relations de couple tanguent. Le soutien manque, l’isolement augmente, la pression augmente…. Quels impacts sur l’harmonie familiale, le sentiment de compétence parentale, le lien (My God, le lien…) entre ces bébés et leurs parents, l’allaitement ?

Ne devrions-nous pas chercher un chemin, continuer?

Voici ce que l’Institut National de Santé Publique (Québec) nous dit dans son rapport publié en juillet 2020, ‘Transition à la parentalité en situation d’adversité : le cas de la COVID-19’.

 » La transition à la parentalité est un événement de vie majeur qui peut débuter avant même la conception d’un enfant et s’étendre sur plusieurs mois, voire sur des années après la naissance de l’enfant. (…) Bien qu’avoir un enfant soit, pour bon nombre d’hommes et de femmes, une expérience positive et enrichissante, l’ensemble de ces changements peut suffire à causer un stress, une détresse psychologique ou favoriser l’émergence de troubles mentaux chez certains. (…) Si la transition à la parentalité est, en soi, un événement qui peut entraîner de la détresse, les conditions dans lesquelles se déroule cette transition peuvent grandement influencer la façon dont celle-ci sera vécue et, conséquemment, influencer le niveau de santé mentale des futurs et nouveaux parents. La santé mentale des parents doit donc être considérée lors des interventions puisqu’elle a un impact direct sur le développement cognitif et socioaffectif de l’enfant, notamment par le biais des pratiques parentales et des liens d’attachement avec l’enfant. La pandémie de COVID-19 et les mesures prises pour limiter sa propagation font partie des éléments de contexte récent qui peuvent influencer la façon dont se déroulera la transition à la parentalité.

(…)

Ces situations de vulnérabilité, ponctuelle ou à long terme, demandent des ajustements et des adaptations dans la façon de soutenir les nouveaux parents dans leur transition à la parentalité. (…) Les chercheurs qui se sont penchés sur la COVID-19 insistent sur 2 éléments (…), soit l’importance de diffuser de l’information et celle de se préoccuper de la santé mentale et du bien-être des parents. »

(voir le document entier ici)

En clair; la COVID complique les choses pour les nouvelles familles, reconnaissons-le et réfléchissons à notre présence. Et…. Entre nous… diffuser de l’information et se préoccuper de la santé mentale et du bien-être des parents, n’est-ce pas exactement 2 éléments de nos désirs de doulas, et qui valident la pertinence de notre présence ?

Que vivent les parents en ces temps de COVID ?

L’ÉPUISEMENT guette tous les nouveaux parents. La COVID et ce qui l’entoure amène un manque d’accès à l’information (accès plus difficiles aux organisations de santé, rendez-vous téléphoniques priorisés, présence impossible du/de la partenaire lors de certaines situations), une perte de repères (que va-t-il nous arriver ??), de l’instabilité et une perte des routines si sécurisantes pour les humains, un manque de soutien critique (tant au niveau du réseau naturel (famille, amis..) qu’organisationnel).  

LA MODIFICATION DE LA RELATION DE COUPLE en prend pour son rhume. Ou pour sa grippe. Ou pour sa COVID. Oui, me direz-vous, c’est toujours le cas quand arrive un bébé. La COVID amène une forte augmentation des stresseurs, de l’isolement et des risques de violence (qui sont déjà exacerbés en période périnatale.)

LE MAINTIEN DU BIEN-ÊTRE ÉMOTIONNEL, PHSYCHOLOGIQUE ET SOCIAL, c’est de la haute voltige, quand on est (nouveau) parent. Notre chère COVID en rajoute; s’adapter est plus complexe ( les rituels tels que le Baby-Shower, Blessingway, le magasinage avec sa mère, la présentation officielle de bébé ou que sais-je encore sont non-recommandés, voire interdits.) Les stresseurs s’accumulent, les vulnérabilités (revenus, relations familiales, problèmes de santé) deviennent caricaturales. Immenses.

Référence INSPQ (voir le document entier ici)

Bon. Respirons un grand coup. Tout passe, c’est temporaire. Mais entre temps, des bébés arrivent. Des parents vivent les débuts de leur vie de famille dans toutes sortes de situations difficles. Ça, ça ne changera pas.

Et les doulas? Que pouvons-nous apporter? Quelle place offrir ? Comment rester, nous qui nous définissons par essence flexibles et ouvertes, dans la lumière ?

Mes collègues des Doulas de Pleine Lune et moi, on s’est réunies. Il faut, je crois, être réalistes; nous sommes dans le monde tel qu’il est; qu’en faire ? Je vous partage nos quelques idées, à vous d’ajouter les vôtres…

  • Informer, informer, informer les parents. Sur la physiologie. Le soutien. Les choix. La communication avec l’équipe soignante. Les mesures en place.
  • Trouver des voies de négociation, des aménagements possibles relativement aux suggestions d’interventions obstétricales ou aux mesures liées à la COVID. Inviter les parents à identifier ce qui, eux, les rassurent.
  • Outiller ++ les partenaires en vue de l’impossibilité que l’on puisse être à leurs côtés lors de la naissance.
  • Proposer des moments de prise de contact de la mère avec son corps, viser la détente, la mollesse, le souffle…. L’inviter à explorer ce qui la nourrit et lui fait plaisir dans son corps…elle sait. Elle trouvera son chemin.
  • Créer des liens !! Nourrir les liens ! Proposer des pistes pour nourrir le lien mère-bébé, qui lui sera TOUJOURS là. Peu importe ce qui pourra se passer autour de cette femme qui donnera naissance, son bébé et elle, cela restera. Envers et contre la COVID. Des liens, aussi, entre les parents, entre les parents et leur communauté, entre les parents et leur doula.

Choisir des pistes musicales qui pourront être diffusées dans l’oreille, rester dans son cœur et la confiance que bébé sait. Il sait.  Pratiquer l’hypnose? Créer un bracelet en invitant les proches à enfiler chacun une perle avec une intention? Enregistrements des voix qui rassurent, encouragent ? Organiser un Blessingway ou des rituels ? En présence, ou en virtuel s’il le faut, mais faisons-en !

  • Observer les peurs. Les entendre. Examiner ce qui pourrait être mis en place si ces situations redoutées arrivent.
  • Connaître les possibilités d’aide professionnelle disponibles près de chez nous.
  • Préparer la présence de la doula en prénatal en invitant les parents à appuyer leur demande auprès de leur équipe soignante; exceptions possibles même en zone rouge ou niveau d’alerte maximale.
  • Peut-être… si on est à l’aise, si on a eu le privilège d’assister à plusieurs naissances… passer à la maison au début du travail. Avec un masque. Et les aimer, à 2m de distance. Les rassurer…puis se reposer.
  • Accompagner plus par téléphone pendant les premières heures. Accompagner, respirer avec elle, rassurer le père…
  • Se présenter coûte que coûte sur le lieu de la naissance, prendre la chance de pouvoir être présente. (croire en la magie 😉 )
  • Soutien à distance selon les besoins des parents pendant la naissance si on n’a pas pu rentrer avec eux.
  • Possibilité d’aller apporter des trucs à la maternité (repas chauds, vêtements confos etc..)
  • Accompagner les parents à organiser leur soutien en post-natal; préparer clairement des demandes, ou coordonner les contributions de l’entourage. Qui peut faire quoi ?
  • Offrir, nous, plus de soutien après la naissance si désiré.
  • Doulas québécoises : inviter les parents à témoigner de leur expérience sur le site ‘Accoucher en pandémie.ca’, à participer aux études qui récoltent les données sur leurs réalités. C’est important, cela participe à faire évoluer les pratiques.

Belles doulas, femmes de cœur, je connais l’élan qui un jour a probablement hurlé dans la chaleur de votre cœur, qui vous a distinctement soufflé à l’oreille : ‘Vas-y, accompagne, c’est ton chemin…’. On ne savait pas, il y a quelques mois, que nous nagerions dans toute cette situation. C’est plus difficile qu’il n’y paraît, plus que ce à quoi on s’attendait. Je sais, notre capacité d’adaptation à tous est étirée, tordue, épuisée, on n’en peut plus.

Mais c’est notre chemin. Comme les bébés, comme celles qui accouchent, continuons. Dans la mesure de nos possibilités. AMOUR.

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